Les PLU sont-ils toujours légaux ?

A la lecture de nombreux PLU, je me suis demandé si ces documents d’urbanisme étaient conformes à notre Constitution, ou alors comment ils pouvaient l’être ? De nombreuses dispositions me semblaient organiser et « instituer » la ségrégation sociale, le traitement différencié des habitants, souvent l’empêchement qui leur était donné d’entreprendre.

Pour l’expliciter le mieux est de prendre un exemple (parmi d’autres). Je vous parlerai donc du PLU de Gonesse, bourg agricole autrefois, et aujourd’hui commune de la frange urbaine Nord de Paris, entre les aéroports du Bourget et de Roissy.

Le PLU de cette commune est assez semblable à celui de nombre de communes péri-urbaines (ou non); l’espace urbanisé est divisé en « zones » (centre ancien, ensembles pavillonnaires, ensembles de logements collectifs, zones d’activités, zones de commerces, d’équipements publics, etc.), chaque zone ayant ses propres règles d’urbanisme. Pourquoi cette différence de traitement ?

La modification récente du PLU de Gonesse, qui risque d’être annulée car elle n’est pas conforme sur de nombreux points, dont les nouvelles obligations environnementales, révèle les injustices de traitement des habitants selon les zones géographiques qu’ils habitent. Ce nouveau PLU visait à rendre « urbanisables » 300ha d’excellentes terres agricoles de la commune pour des projets de promotion immobilière destinés aux activités, au commerce, aux loisirs et à l’hôtellerie, dans un projet « sur mesure » (découpage des zones) pour les promoteurs. Et ceci sous les voies aériennes du Bourget et de Roissy, là où s’est écrasé le Concorde…
Or, plus loin des pistes, sur la même commune, le développement de ces activités est interdit, dans les tissus urbains pourtant déjà urbanisés et comportant des espaces vacants !

Je vous en donne un exemple.
En zone UG du PLU de Gonesse, zone « pavillonnaire », la plus vaste, sont interdits :
* les nouvelles constructions à destination d’artisanat, de commerce de détail et de restauration;
* les constructions à destination de commerce de gros, hébergement hôtelier et touristique, de cinéma, d’industrie, d’entrepôt et de centre de congrès et d’exposition;
* etc.
là où nous pourrions justement penser qu’il existe des espaces non bâtis, des habitants susceptibles d’entreprendre et de continuer à former un tissu urbain riche et pluriel, de créer des emplois proches des habitations… (je n’insiste pas ici sur les règles souvent incompréhensibles de retrait obligatoire de 4m sur la rue (de desserte), ou vis à vis des mitoyens ou du fond de parcelle… Il semble évident que sur les mitoyennetés, seule la règle de hauteur limitée doit prévaloir, pour respecter l’ensoleillement des voisins).

Vous remarquerez que toutes ces interdictions faites aux habitants sont autorisées, à quelques centaines de mètres, sous les avions, pour de grands groupes privés de promotion immobilière. Il semble y avoir deux poids deux mesures, et un traitement particulièrement injuste des citoyens, selon qu’ils soient humbles, ou riches et puissants.

Qui rédige et décide des PLU ? (nous pouvons étendre la question aux PLUi)

N’est-il pas temps de confier cette tâche essentielle, qui fonde les relations sociales et leur équité, mais aussi l’avenir de nos territoires et de nos paysages, à des personnalités ou entités professionnelles irréprochables et exemplaires, dégagées des considérations électorales auxquelles sont trop soumis les élus, ou des pouvoirs financiers ? Bref, une autorité indépendante, reconnue pour des qualités professionnelles irréprochables.

Au niveau départemental les CAUE font souvent un travail remarquable d’inventaire des patrimoines locaux et régionaux, de connaissance et de prospection des territoires. Composés notamment d’urbanistes, d’architectes, de paysagistes, non soumis aux pouvoirs économiques, ne faut-il pas leur confier la responsabilité de l’aménagement du territoire et de la rédaction des documents d’urbanisme afférents ? Ou un organisme qui y ressemblerait.

J’ai lu une fois un PLU dans lequel toute la zone urbanisée était regroupée en une seule zone, UG. Seules des variations sur la hauteur autorisée des bâtiments marquaient des différences selon les intensités urbaines, et permettaient la protection de tissus anciens bas et denses (la question des nuisances graves au voisinage dues aux différentes pollutions mérite d’être traitée à part). Rares sont les activités qui nécessitent un retrait de la ville: logistique, grandes usines ? L’exemple de cette commune devrait nous donner à réfléchir et peut être nous servir d’exemple.

Luc Dupont, diplômé en architecture (DPLG) et ingénieur agronome.

2 commentaires

  1. OUI, pour donner aux CAUE le pouvoir de faire modifier le PLU.
    Des doutes cependant sur la pratique des zones urbaines générales. A Clermont-Ferrand, en zone UG, en effet, seules les hauteurs sont réglementées, mais les prospects ont disparu. Ça donne des résultats discutables avec la perte des paramètres d’alignement et l’abandon du rapport hauteur/largeur dans les rues..

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  2. Je suis d’accord avec vous. Hauteur, prospects et alignements.
    Les moyens informatiques permettent de faire sur le parcellaire des « gabarits possibles » sur chaque parcelle; cela serait beaucoup plus parlant pour les habitants que les documents PLU illisibles et aux informations redondantes et délayées…
    Cette maquette communale devrait être rendue obligatoire, et disponible sur internet sur le site de la commune; c’est faisable à moindres frais… Deux informations à donner: le bâti existant (en blanc opaque par exemple), le bâti possible (en rouge transparent).

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