Après le mouvement des gilets jaunes, le gouvernement a proposé ce débat.
Les Architectes sont des citoyens, comme leurs partenaires de l’acte d’aménager ou de construire, d’élaborer le paysage.
Il leur a donc été proposé, au niveau de notre Région Réunion, de venir s’exprimer sur leurs doléances et besoins pour une pratique du métier plus adaptée aux réalités du territoire, respectueuse de son environnement singulier.
Les échanges lors de cette après-midi de débat ont mis en lumière des désirs et besoins qui rejoignent ceux qui s’exprimaient à l‘échelle nationale.
Le besoin d’écoute, d’échanges et de partage est sans doute le fil conducteur de l’ensemble des points mis en débat.
– Besoin de se regrouper entre architectes et partenaires dans un premier temps, de trouver les lieux permettant aux divers professionnels de tenir et animer des discussions et des échanges avec le grand public, avec ceux qui se sentent concernés par l’aménagement de notre territoire.
– Besoin de retrouver l’esprit d’une architecture qui est d’intérêt public, et de voir nos politiques se former et s’intéresser suffisamment à ce domaine afin de trouver de nouvelles règles partagées par tous dans l’élaboration et le contrôle des règles qui encadrent l’acte d’aménager et de construire.
– Besoin de voir ces règles s’élaborer et être contrôlées au plus près du terrain, tenir compte des réalités et de la culture enracinées localement, afin de retrouver du sens et être mieux assumées par les acteurs locaux.
Un constat s’impose, plus crucial à la Réunion qu’en Métropole :
– 60% des constructions, la majeure partie du paysage, échappent à la vision, au conseil, au contrôle de l’architecte, d’un paysagiste, d’un urbaniste…
– Les contrôles s’effectuent quasi exclusivement sur les projets établis par les professionnels, et ces derniers peuvent voir intervenir 4 à 5 architectes pouvant remettre en cause le droit à construire ou la qualité du projet.
Propositions :
– Mieux répartir et coordonner les ressources de l’Etat (Architecte conseil, Deal, ABF,…) et locales (Architectes des communes, CAUE, …) avec comme objectif que la totalité des projets d’aménagement et constructions soit suivis et validés par des architectes habilités à cet effet.
– Favoriser le recours systématique à un architecte en créant des procédures simplifiées en cas de visa d’un professionnel.
– Mettre en place une présentation devant une commission ad’hoc, afin que les concepteurs y présentent leur projet dans le cadre d’une concertation large, regroupant les personnes concernées et impactées par les programmes concernés. Les délais d’obtention du PC étant alors réduits, comme les possibilités de recours des présents.
Autre constat :
Si l’architecture est d’intérêt public, il existe de nombreux freins et entraves à une vision totalement partagée et admise par chacun afin de définir et installer durablement une réelle qualité architecturale pour tous.
Propositions :
Sont alors évoqués nombre d’expériences en cours et à développer sans doute, menées par des associations et les CAUE comme la sensibilisation et l’initiation à l’architecture dans les écoles et collèges, les journées des métiers, et le désir de voir formés à l’architecture l’ensemble des intervenants à l’acte de bâtir.
Il est proposé, dans le but d’une meilleure efficacité et transparence, que les Permis de Construire soient instruits à l’échelle des communautés de communes avec la conformité contrôlée à l’échelon communal.
Les participants au débat relèvent les disparités entre les communes selon les personnes en charge et les réelles ambitions d’aménagement durable mises en place ainsi que l’envie réelle d’une architecture de qualité.
Des commissions d’urbanisme mises en place au niveau des collectivités engageraient les élus comme leur personnel à se former et mettre en œuvre des politiques d’aménagement du territoire de qualité.
Il est demandé d’accroître les moyens financiers et humains alloués aux CAUE et ABF afin d’optimiser leur capacité de soutien à la qualité architecturale.
Constat encore :
Cette qualité a nécessairement un coût que ne peuvent assumer les seuls architectes et bureaux d’études partenaires. Il est demandé une réflexion nationale sur ce sujet.
Propositions :
– Le CCAGpi devra revoir le caractère forfaitaire et intangible de la rémunération de l’équipe d’ingénierie afin de tenir compte des dépassements de délais récurrents et des surcoûts induits, supportés abusivement par ceux-ci.
– Les situations de monopoles inhérents au caractère insulaire renchérissent l’acte de construire ou aménager. L’Etat doit intervenir afin de réguler ce problème dans l’intérêt des populations concernées.
– De la même façon, l’Etat doit équilibrer certaines situations de position dominante qui induisent des interprétations erronées et partiales, par EDF par exemple, des règles applicables dans notre île. Notre insularité impose d’analyser cette situation à l’échelle locale.
Les étudiants et jeunes architectes rappellent enfin leur désir de partenariat avec les professionnels en place dans le but de leur meilleure insertion future dans la vie active.
Ce point ramène au désir, exprimé en ouverture de débat, de mettre en oeuvre tout moyen de faciliter les échanges entre professionnels et l’ensemble des populations concernées, élus comme citoyens, dans le but d’une recherche partagée de la qualité optimale et la mieux adaptée au territoire de l’aménagement, du paysage et de l’architecture.
Tessier Jean